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15 décembre, 2005

L'enfer du golf


Ceci est une histoire réelle qui vient de l’au-delà. Jean est décédé il y a quelque temps. Golfeur impénitent et amateur laborieux (index 18), lors du jugement dernier, la sentence fut sans appel : l’enfer. Sa passion dévorante pour le golf en fut le motif : trop souvent ce sport avait prévalu sur l’attention portée à son prochain et sa famille avait souffert de cette vie qui partait à la dérive. La sévérité du jugement fut tempérée, du moins le croyait-il, par le fait qu’il eut droit à l’enfer des golfeurs.
L’enfer des golfeurs pour lui, c'était un paradis: une étendue verte sans fin, bordée d’une mer d’azur, sous un soleil d’été. Des tas de golfeurs sympas et golfeuses pulpeuses au sourire radieux qui manient le wedge en toute décontraction... Ce qui attira sa curiosité, ce fut le coin des célébrités : imaginez François Mitterrand essayant de sortir d’un bunker, conseillé par les compères Dwight Eisenhower et John Fitzgerald Kennedy (de loin le meilleur des trois). Le must c’était le petit practice réservé aux approches, car Jean a toujours consacré beaucoup de temps et d’attention au petit jeu et ici se concentraient les légendes : à côté des gigantesques bacs de pro V1 où l’on puisait à volonté, on y voyait l’ange Bobby Jones déployer son swing superbe. C’est là que Payne Stewart, avec ses habits de lumière apprit à Jean à produire un backspin d’enfer (si on peut dire).
Tous les jours, il y avait un concours d’approches ou de putting suivi d’une bringue arrosée du meilleur whisky de St-Andrew (50 ans d’âge). Une fois il fit équipe avec Walter Hagen dans un concours mémorable de chips contre Arnaud Massy et la jeune Simone Thion de la Chaume ce qui fut l’occasion de parler français.Chaque matinée, s’il le voulait, il prenait un cours avec le pro qu’il avait choisi, un certain Ben Hogan. Jean acquit un petit jeu qu’il n’aurait même pas pu entrevoir en rêve de son vivant. Il se demandait seulement s’il y aurait des compétitions normales, sur le parcours, car il lui semblait qu’il avait désormais un petit jeu suffisant. Il s’en ouvrit une fois à son pote Payne Stewart qui, pour toute réponse baissa les yeux, alors il n’aborda plus le sujet.



La vie, pardon la mort, s'écoulait lentement à coups de fers 9 et de sand-wedges (une fois Jean emprunta même le premier sand-wedge de l'histoire à Gene Sarazen, quelle émotion! ) . Mais, jamais, jamais de grand jeu...
Il avait bien repéré un vieil homme, arrivé il y a plus de 15 ans et au comportement bizarre : il était triste et s’isolait souvent. Jean alla le trouver. Pour lui remonter le moral il lui parlait du golf à perpétuité que l’on jouait ici. Il se risqua à lui dire :

- La seule chose un peu bête ici, c’est qu’on fait jamais de drives. Je me demande bien pourquoi.
Alors Mike Austin le fixa d’un regard glacial et lui lança:
- Mais mon garçon… C'EST L'ENFER ICI !!!
-Minor Swing©2005-

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